Trois sœurs, trois destins entrelacés. Au fil du temps, les existences se précisent, les choix se figent, les rêves de la jeunesse se dissipent dans la médiocrité ambiante. Pourtant elles restent sœurs, jamais elles ne l’oublient... Après Medea, Simon Stone revient à l’Odéon, où il est artiste associé, pour y recréer sa propre interprétation du chef-d’œuvre par lequel Tchekhov ouvre le XXe siècle. L’air de famille, chez Stone, a tout d’un air du temps. L’œuvre du Russe est ici comme une sœur aînée, celle de l’Australien est sa cadette. Il est beaucoup question d’amour chez la première, de sexe chez la seconde, et de frustration chez les deux. La maison des Prozorov envahit le plateau, qu’elle occupe de sa masse impressionnante. Électrique, efficace, drôlement désespérée, la langue de Stone épouse les rythmes de notre modernité. Mais sous les éclairs aveuglants de l’actualité, quelque chose du monde n’a peut-être pas tant changé que cela depuis 1900. À travers la vitesse des échanges, nous entendons percer, et nous reconnaissons, la même difficulté à communiquer, la même “illusion de la connexion”. Ces êtres assis sous nos yeux “dans l’antichambre du drame”, ces frères (et sœurs) humains qui nous sont si proches, s’inventent des histoires en attendant comme autrefois que le rideau se lève sur la vraie vie.
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